24/11/2012
ORTHOPHONIE BABY
Aujourd'hui c'est la journée des orthophonistes. Ils se présentent dans les maternités et dialoguent avec les nouveaux nés pour vérifier l'état de leur langue et permettre de prévenir les caries du langage.
Ils discutent aussi avec les mamans pour les rassurer, pour leur dire qu'ils seront toujours là pour favoriser un développement harmonieux de leur enfant.
A une maman, un orthophoniste s'adressait ce matin ainsi :
- Je m'appelle Alain Niala, je suis orthophoniste.
- Oui, bonjour Madame.
- ... Comment allez-vous ?
- En ce moment, pas souvent Docteur.
- Je suis là pour votre enfant.
- Oui, moi aussi.
- Avez-vous remarqué quelque chose chez votre enfant ? Il a quatre jours, n'est-ce pas ?
- Oui. Il ne parle pas. D'autre part, JR est mort hier et bien que je lui ai expliqué quel personnage c'était il ne paraît pas comprendre. Est-ce normal ?
- Non Madame, ce n'est pas normal. Normalement votre enfant doit comprendre tout ce que vous lui dites, en tout cas il doit en avoir écho en lui.
- Que dois-je faire Madame le docteur ?
- Je m'appelle Alain. Ce que vous pouvez faire est simple, vous viendrez me voir à votre sortie, avec l'enfant, et nous verrons si nous pouvons le sauver d'une perte précoce de l'audition et de l'affectivité.
- Merci docteur. En attendant, que dois-je faire ?
- Faites pour le mieux et tout ira bien, n'improvisez pas, soyez franche avec lui et ne dormez que lorsqu'il dort, à moins que vous ayez faim avant. Surtout ne le prenez pas dans les bras en l'absence de son père, il croirait que vous lui en voulez. Soyez attentive aussi à ses défécations et à ses sourires, qui doivent être concomitants.
- Et s'ils ne le sont pas ?
- C'est un cas d'urgence, il faut consulter.
- Docteur, mes parents m'ont toujours dit de me méfier des médecins.
Ca ne m'étonne pas Madame, les parents sont les pires ennemis des enfants, ils les élèvent n'importe comment, les font travailler le plus tôt possible, ne s'intéressent pas à ce qui les intéresse vraiment et encore moins aux matières qu'ils étudient, comme à celles qu'ils font d'ailleurs. Les parents devraient être destitués de leur fonction d'éducation au plus tôt, avant que le mal soit fait, c'est à dire avant la conception.
Merci Madame le docteur.
- de rien, soyez heureuse et confiante, la science veille. Demain c'est la journée des débauchés, vous pourrez en parler avec votre enfant.
22:22 Publié dans vérités | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : orthophonie, naissance, science, défécation, jr, audition, affectivité, éducation, conception, débauchés
31/12/2009
PARESSER OU NE RIEN FAIRE (II)
Je tiens de la paresse la philosophie, de l'indolence le comportement. Mais il m’a fallu travailler pour ça ! Avant, je n’étais qu’un amateur paresseux, il a fallu que je cultive l'idée qu'il ne faut rien faire en m'abstenant régulièrement de faire. Ne rien faire impose un effort soutenu mais on s’aperçoit vite qu’heureusement il porte ses fruits.
Le paresseux nourrit sa paresse de l'idée que, sans elle, il serait le plus génial des créateurs, grâce à elle, il est dispensé d’en faire la preuve. Il ne se berce pas d'illusions, il se contente de se bercer tout court, sur son transat. Il sait qu'il n'utilise qu'une partie infime de ses potentialités, mais n'en tire pas gloire.
Le paresseux pourrait finir par douter qu'il peut accomplir quelque chose de grand, heureusement il ne s'en soucie pas. Il a l'orgueil de ses défauts, la béatitude de ses indolences. Chez certains, la paresse estompent le don, diluent les qualités, affichent davantage les travers. C'est triste.
L’inaction est un art mais également une technique. Elle est amorcée par un don et entretenu par une pratique. Qui s'abstient trop longtemps de ne rien faire prend le risque de basculer dans le faire. Il convient de battre le rien faire tant qu'il est chaud.
Je suis comme une plage qui s'étire au soleil. Lorsque je ne suis pas la mer ou la plage elles-mêmes, je les contemple de loin, car y aller supposerait de se déplacer.
La paresse existe en écriture : elle consiste à laisser parler le narrateur. Dans Manon Lescaut, histoire du chevalier des Grieux, le narrateur cède la parole à des Grieux, ce qui représente pour l'auteur un mode de narration un peu facile, proche du rien faire. "Je m'attardai au lit pendant quelque temps, contemplant paresseusement cette vision vaporeuse et indistincte, essayant de reconstituer ces traits qui se confondaient dans mes souvenirs avec ceux de plusieurs statues d'Antinoüs. Analysant mes impressions, j'avais la conscience d'une sensation nouvelle, d'un vague malaise mêlé d'inquiétude. Je ressentais un vide en moi, sans pouvoir comprendre si ce vide était dans mon coeur ou dans ma tête. Je n'avais rien perdu et pourtant je me sentais seul, abandonné, que dis-je dépouillé. J'essayai de m'expliquer à moi-même mon état morbide, …" où l'on voit bien que tout cela est du rien faire, mais avec mauvaise conscience. Très mauvais.
Contre exemple, extrait de LA CUREE : "Renée avait reposé sa tête, les yeux demi-clos, regardant paresseusement des deux côtés de l'allée, sans voir. A droite, filaient doucement des taillis, des futaies basses, aux feuilles roussies, aux branches grêles. (...) Ce coin de nature, ce décor qui semblait fraîchement peint, baignait dans une ombre légère, dans une vapeur bleuâtre qui achevait de donner aux lointains un charme exquis, un air d'adorable fausseté. Sur l'autre rive, le Châlet des îles, comme verni de la veille, avait des luisants de joujou neuf ; (...) Accoutumée aux grâces savantes de ces points de vue, Renée, reprise par ces lassitudes, avait baissé complètement les paupières, ne regardant plus que ses doigts minces qui enroulaient sur leurs fuseaux les longs poils de la peau d'ours. " Rien à ajouter, voilà du rien faire de qualité. Attention, je ne dis pas que Renée soit un exemple à suivre, elle a des velléités de faire trop fréquentes, qui finiraient par exciter sa volonté !
On entend parfois que le paresseux est un gros travailleur. Faux ? Vrai ? Faux vrai ? La paresse freinerait la production en alimentant le vice ? Elle serait une façon d'aménager son temps de travail, dans l'esprit au moins ? Tandis que Karl Marx distinguait de façon intéressante ouvrage et travail, son gendre et disciple, Paul Lafargue, également gros travailleur, publiait en 1881 son texte le plus célèbre : Le droit à la paresse.
La paresse est un péché capital, aurait pu dire Marx, grand spécialiste de la chose. Le péché capital est nommé ainsi parce qu'il est à la source de tous les autres. Au fait, quels sont les six autres ? Qui le sait ? Eh bien, ce sont avarice, luxure, envie, gourmandise, colère, orgueil, avarice, adultère, envie, ce qui fait bien sept.
Des images de la paresse ?
Loir. Couleuvre. Le lierre nonchalant sur une façade au soleil, l’éléphant de mer (ou phoque à poil ras). Et aussi : le paresseux, bestiole préférée de Gaston Lagaffe, mammifère brésilien aux longs poils mais aux gestes mesurés, il a la cosse et dort 20 H par jour. Et encore : un époux gâté, dit COLETTE dans LA VAGABONDE.
Et encore : le lézard taiseux qui prend son temps, le transatlantique silencieux sortant du port qui se laisse traîner par un remorqueur nerveux à gros nez rond et aux hublots écarquillés, une aurore d'automne, que DAUDET qualifie de paresseuse, propice à demeurer au lit...
Quelles sont les aptitudes nécessaires à la paresse ? Lenteur, confort, chaleur, retraite, oisiveté, lâcheté, mollesse, apathie, inertie, langueur, vagabondage, indifférence, dépression, assoupissement, engourdissement, atonie.
Quelle est la qualité nécessaire à un bon paresseux ? La mémoire, pour se souvenir de ne rien faire. Mais CONDILLAC, qui n'est pas une voiture, nous rappelle que la mémoire s'étiole dans la paresse. Terrible dilemme : comment se souvenir de ce qu'il faut faire pour ne rien faire si la mémoire ne peut s'entretenir qu'en faisant.
VACHARD en ancien français signifiait mou, paresseux, mais ça n'a rien à voir, sinon que les choses se transforment. Une expression utilisée surtout dans le secteur tertiaire: il est urgent de ne rien faire. Face à un problème épineux, on peut compter sur un développement extérieur, qui changera les paramètres, voire réglera carrément le problème. C’est évidemment l’atout maître du paresseux dans tous les domaines.
Le paresseux ne rechigne pas à afficher des convictions fort peu travaillées, issues d'un effort minimum. Il assènera ses points de vue avec la force puisée dans la fragilité de ses arguments.
Le paresseux a besoin d'alibi, c'est la raison pour laquelle i lit parfois, sachant, comme le remarque STENDHAL dans son journal, que « lire permet au cerveau de paresser et de ne rien créer pendant ce temps ». Musicien de génie comme excellent bricoleur, le paresseux s'abstiendra évidemment de dire qu'il sait la musique et connaît le bricolage. Bref, le paresseux sait que, s’il voulait…
Ne jamais considérer comme définitivement acquises ses aptitudes à la paresse, les entretenir sans cesse par des exercices minutieux est préférable. Ne rien faire réclame aussi un peu de savoir faire… Le rien faire appartient donc au domaine du faire, auquel il ne s'oppose pas, mais dont il est une des facettes.
Avant de faire, il faut réfléchir, hésiter sur la marche à suivre, semer des embûches sur sa route, se faire peur, etc. bref ne pas se brancher immédiatement. Quand on branche un matériel sur l’ordi, une fenêtre invite à choisir une action dans une liste mais propose aussi, judicieusement : ne rien faire.
19:36 Publié dans A la langue près - tentative pour un dictionnaire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : paresse, rien faire
28/12/2009
PARESSER OU NE RIEN FAIRE ?
La paresse, l'indolence et l'oisiveté, vices si naturels aux enfants, disparaissent dans leurs jeux, où ils sont vifs, appliqués, exacts (...)
LA BRUYèRE, les Caractères, XI, 55.
Le blaireau est un animal paresseux, défiant, solitaire, qui se retire dans les lieux les plus écartés, dans les bois les plus sombres, et qui s'y creuse une demeure souterraine.
BUFFON, Hist. nat. des animaux, «Le blaireau».
Nul ne mérite d'être loué de bonté, s'il n'a pas la force d'être méchant : toute autre bonté n'est le plus souvent qu'une paresse ou une impuissance de la volonté.
LA ROCHEFOUCAULD, Maximes, 237.
La botanique n'est pas une science sédentaire et paresseuse qui se puisse acquérir dans le repos et l'ombre d'un cabinet.
FONTENELLE, Tournefort.
Cancre : sorte d'écrevisse; la lenteur et la pesanteur de sa marche ont fait donner son nom dans les collèges aux écoliers paresseux et aux jeunes gens dépourvus de dispositions, parce qu'on suppose qu'ils se traînent paisiblement sur les traces des autres, ou parce qu'au lieu d'avancer ils marchent à reculons.
COUSIN JACQUES, Dict. des néologismes, 1801, Moutardier, in D.D.L., II, 11.
C'était un garçon solitaire, désadapté, paresseux et vaniteux.
SARTRE, le Sursis, p. 118.
Prenez-moi dans le calme, je suis l'indolence et la timidité même : tout m'effarouche, tout me rebute; une mouche en volant me fait peur; un mot à dire, un geste à faire épouvante ma paresse; la crainte et la honte me subjuguent à tel point que je voudrais m'éclipser aux yeux de tous les mortels.
ROUSSEAU, les Confessions, I.
(...) ma paresse était moins celle d'un fainéant que celle d'un homme indépendant, qui n'aime à travailler qu'à son heure.
ROUSSEAU, les Confessions, IX.
(...) ces dormeuses qui ne dorment plus tout à fait, mais qui évitent de remuer, pour jouir de leur paresse.
ZOLA, la Terre, V, VI.
Dans les livres d'Edgar Poe, le style est serré (...) la mauvaise volonté du lecteur ou sa paresse ne pourront pas passer à travers les mailles de ce réseau tressé par la logique.
BAUDELAIRE, E. A. Poe, sa vie et ses ouvrages, III.
De toutes les passions, celle qui est la plus inconnue à nous-mêmes, c'est la paresse; elle est la plus ardente et la plus maligne de toutes, quoique sa violence soit insensible, et que les dommages qu'elle cause soient très cachés. Si nous considérons attentivement son pouvoir, nous verrons qu'elle se rend en toutes rencontres maîtresse de nos sentiments, de nos intérêts et de nos plaisirs (...) Le repos de la paresse est un charme secret de l'âme qui suspend soudainement les plus ardentes poursuites et les plus opiniâtres résolutions; pour donner enfin la véritable idée de cette passion, il faut dire que la paresse est comme une béatitude de l'âme, qui la console de toutes ses pertes, et qui lui tient lieu de tous les biens.
LA ROCHEFOUCAULD, Maximes, 630. (Cf. aussi les maximes 266, 398, etc.).
Les paresseux ont toujours envie de faire quelque chose.
VAUVENARGUES, Maximes et Réflexions, 467.
Tout enfant, j'ai senti dans mon coeur deux sentiments contradictoires : l'horreur de la vie et l'extase de la vie. C'est bien le fait d'un paresseux nerveux.
BAUDELAIRE, Journal intime, «Mon coeur mis à nu», LXXIII.
Un type paresseux et froid, un peu chimérique mais très raisonnable au fond, qui s'est sournoisement confectionné un médiocre et solide bonheur d'inertie (...)
SARTRE, l'âge de raison, p. 54.
Deux parts en fit, dont il soulait (avait coutume de) passer
L'une à dormir, et l'autre à ne rien faire.
LA FONTAINE, Pièces diverses, II, Épitaphe d'un paresseux.
Extrait de Mme BOVARY : « Cependant, sous la pluie des pensums, l'ordre peu à peu se rétablit dans la classe, et le professeur, parvenu à saisir le nom de Charles Bovary, se l'étant fait dicter, épeler et relire, commanda tout de suite au pauvre diable d'aller s'asseoir sur le banc de paresse, au pied de la chaire. Il se mit en mouvement, mais, avant de partir, hésita. »
Le mariage et surtout la province vieillissent étonnamment un homme, l'esprit devient paresseux, et un mouvement du cerveau, à force d'être rare, devient pénible et bientôt impossible.
STENDHAL, Souvenirs d'égotisme, V.
la paresse étouffent l'esprit". FENELON.
Musarder signifie rêvasser, douce flânerie, paresseuse délectation à contempler un objet ou une idée, musarder est avoir le museau en l'air, ce qui convient bien au poète. Edmond ROSTAND.
Il était indolent et musard, possédait à un haut degré cette charmante faculté de s'exagérer son bonheur, et d'évanouir le souci présent dans le rêve, l'espoir ou l'ivresse. GIDE, Si le grain ne meurt. Dans son journal, GIDE évoque aussi un petit train musardeur.
Selon PEGUY : le travail se fatigue alors que la paresse, non.
"la pauvreté ne peut excuser ni l'inaction des Etats ni l'avidité des parents. Il est des degrés dans la misère, et bien des familles pourraient, si elles le voulaient, adopter d'autres stratégies de survie. Au Bangladesh, certains pères encore jeunes, entretenus par leurs enfants, vivent une existence paresseuse. On les appelle des " fakirs "." (Le MONDE).
Si vous avez lu jusque là c’est que le sujet vous passionne ! Alors vous en diriez quoi, vous, de la paresse, du rien faire, de l’inaction ?
22:53 Publié dans A la langue près - tentative pour un dictionnaire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : paresse, rien faire